LE GRAND N’IMPORTE QUOI DES CATÉGORIES ÉNERGÉTIQUES

Non, le diesel n'est pas moins polluant que l'essence.

C’est l’ une des plus grosses entourloupes marketing de l’industrie automobile, les catégories énergétiques censées nous renseigner sur les émissions polluantes des véhicules ne sont que de la poudre aux yeux, car elles ne prennent en compte que le CO2.

Et croyez-moi, j’en connais un rayon, puisque je travaille comme journaliste automobile depuis près de 7 ans. Comme les ampoules ou les frigos, chaque voiture est rangée dans une catégorie énergétique allant de A à G. La catégorie A étant associée aux véhicules les moins polluants, la G aux vilains qui détruisent l’environnement. Logiquement, le consommateur soucieux de son impact écologique tendra à choisir un véhicule à faibles émissions, en catégorie A ou B.

Mais ce n’est que la première lecture. En s’intéressant à cette classification, on se rend vite compte qu’elle est doublement faussée, car calculée en fonction des émissions de gaz carbonique (pas les autres substances hautement nocives), et que ses critères changent d’un pays à l’autre.

La Suisse est à l’Ouest!

Par exemple, en Suisse, l’étiquette énergie est établie en fonction des émissions de CO2 et du poids à vide du véhicule… ce qui donne lieu à de totales aberrations. Ainsi, une grosse voiture diesel de 2 tonnes qui produit 129g/CO2 par km sera classé en catégorie A ou B, alors qu’une petite citadine essence de moins de 1300 kilos émettant 115g/C02 par km sera considérée comme très polluante.

En résumé, d’après les petites affichettes qui trônent fièrement à côté des voitures exposées chez les concessionnaires: émettre 129g CO2/km serait donc moins polluant que 115g de CO2/km… VRAIMENT??

Vous voulez un exemple concret?

  • Une FIAT PUNTO 1.4 NP MyStyle qui pèse 1315kg et émet 115g de CO2/km est en catégorie E.
  • Une AUDI Q5 2.0 TDI ultra qui pèse 2035kg et émet 129g de CO2/km n’est qu’en catégorie B, alors que ses émissions sont plus élevées.

Mais il y a encore plus effarant! Cette notification fait la promotion indirecte des moteurs diesel, réputés pour émettre moins de CO2, mais bien plus généreux en NOx (les oxydes d’azote) et benzopyrènes, des particules fines classées comme « cancérogènes certains » par l’OMS depuis 2012.

Le problème du diesel

Oui, le diesel est plus économique que l’essence sur la distance. Oui, un bloc diesel produisent en moyenne 25% de CO2 en moins qu’une motorisation essence équivalente. Oui des progrès ont été faits… Mais quels progrès?

Dans les années 1990, les gaz d’échappement noirs émis par les diesel sont au centre des préoccupations. L’écologie pointe le bout de son nez dans des villes qui peinent à respirer. PSA étouffe alors le problème en développant rapidos son fameux FAP, le filtre à particules, installé de série dès l’an 2000 sur tous les véhicules diesel du groupe. Une invention « révolutionnaire » qui rend invisible les fumées et redore le blason de ces moteurs mal aimés, qu’on vend désormais comme propres et économiques. La concurrence (maintenue écartée du FAP par brevet) lance, quant à elle, le filtre à oxydation.

Ces stratégies sont payantes, les ventes de diesel augmentent, poussées par une fiscalité favorable. En France, leur proportion qui représentait moins de 10% au début des années 80, couvre aujourd’hui près des 3/4 du parc automobile du pays. En Europe de l’Ouest, le taux de diesel est de 55,2 % et même le Japon qui avait longtemps interdit ce carburant fait aujourd’hui machine arrière.

Mais voilà, pour qu’un FAP fonctionne correctement, il faut réunir un nombre certain de conditions: le moteur doit avoir parcouru au minimum 8 à 15km au dessus de 50km/h,  ou alors avoir roulé au moins pendant 15 minutes à régime soutenu. Pour un usager qui conduit principalement en ville, le FAP est pour ainsi dire inutile…

Coïncidence? Depuis l’introduction de ces technologies « propres » en France, les émissions cancérigènes HAP dues au diesel ont augmenté de 140 % entre 1990 et 2009. Les rejets de dioxydes d’azote ont quasiment triplé en deux décennies, passant de 30.000 tonnes en 1990 à plus de 80.000 tonnes en 2012.

Des effets sur l’homme et sur la biodiversité

Maladies respiratoires, allérgie, cancers et j’en passe, en Europe, la pollution de l’air est la 3ème cause de mortalité, avec 348 000 décès prématurés par an.

D’après le journal Le Monde, « globalement, plus de 47 millions de personnes en France sont soumises à une concentration moyenne annuelle de PM2,5 dépassant la valeur guide de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), soit 10 µg/m3″ Mais il n’y a pas que l’Homme qui souffre de sa bêtise. La pollution de l’air affecte la santé de nombreux êtres vivants évolués, et tue également des lichens, algues et invertébrés. Elle a aussi des impacts indirects sur l’écosystème en dégradant la perception des odeurs et hormones. Les espèces peinent à se nourrir et à se reproduire car tous leurs sens sont perturbés.

Le CO2, un faux coupable

Le CO2, est un problème, mais un problème qu’on peut plus ou moins maîtriser. Vous et moi en produisons 1kg par jour, rien qu’en respirant. Ainsi, les 14 milliards de poumons humains produisent à eux seuls 8 millions de tonnes métriques de dioxyde de carbone, ce à quoi se rajoutent le CO2 produits par tous les autres organismes vivants, un CO2 ou gaz carbonique régulé par les forêts et océans.

Les usines, les chauffages, les transports produisent également du CO2 et ça devient un problème lorsqu’il y en a trop. Heureusement, les technologies ne cessent de s’améliorer, et globalement, les véhicules et les habitations produisent de moins en moins d’émissions polluantes. On peut donc décemment espérer que les automobiles du futures arrêteront de nous empoisonner… le jour où les magnats du pétrole voudront bien arrêter de nous imposer leurs systèmes en rachetant les brevets de moteurs propres à tour de bras, mais c’est un autre débat.

De l’espoir? Bof.

AdBlue, Hybride diesel, technologies avancées, le diesel s’améliore sensiblement avec les années, mais le progrès est coûteux et met du temps à être appliqué globalement le parc automobile ne se renouvelle que lentement et nos vieilles voitures partent souvent polluer d’autres continents. Mais même si la science avance, il ne faut pas oublier que même absorbées en faible quantité, les microparticules sont gravement nocives pour la santé. Soyons clairs, l’essence n’est non plus pas toute rose, mais à choisir entre les deux, c’est le diesel qui est hors-jeu.

Seule issue, rouler en vélo!

Leïla Rölli

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