La viande bio, vraiment écolo?
Une nouvelle étude casse ce cliché si bien ancré
Qui n’a jamais entendu ses proches ou même des politicien.ne.s et autres personnalités mettre en avant le fait que « Oui mais moi ma viande je l’achète bio et locale! ».
Cette phrase est constamment utilisée pour décrédibiliser les personnes adoptant une alimentation végane pour des raisons environnementales.
Et pourtant, outre les dizaines de milliards de vies animales qu’une alimentation végétale permettrait de préserver – voire de ne tout simplement pas mettre au monde -, une telle alimentation est également plus respectueuse de l’environnement qu’une alimentation carnée, même biologique!
C’est ce qu’une nouvelle étude publiée dans le journal Nature Communications et résumée dans un article de l’excellent journal « The Guardian » a, à nouveau, constaté.
Vous trouverez donc, ci-dessous, la traduction de cet article et je vous invite par ailleurs fortement à prendre connaissance de l’étude elle-même afin de consolider votre opinion à ce sujet.
Bonne lecture!
*Début de la traduction*
La production de viande biologique est tout aussi néfaste que la conventionnelle pour le climat, selon une étude
L’analyse a estimé les émissions de gaz à effet de serre résultant de différents aliments et a calculé combien leur prix devrait augmenter pour couvrir les dommages qu’ils causent du fait de leur participation au dérèglement climatique.
Pour le bœuf et l’agneau, l’étude a montré que la production biologique et conventionnelle entraînait des coûts climatiques similaires. Le poulet biologique était légèrement moins bon pour le climat et le porc biologique légèrement meilleur que leurs homologues conventionnels.
Les émissions du bétail conventionnel proviennent de leur fumier et, pour les vaches et les moutons, également des émissions de méthane. Les céréales qu’ils consomment peuvent, en outre, entraîner des émissions élevées, surtout si elles sont associées à la déforestation, notamment en Amérique du Sud.
Les animaux d’élevage biologique ne sont pas nourris avec du fourrage importé, mais souvent à l’herbe. Cela signifie qu’ils produisent moins de viande et grandissent plus lentement, ce qui fait qu’ils ont « plus de temps » pour émettre des gaz à effet de serre avant l’abattage, ont déclaré les chercheurs. Pour ce qui est des végétaux, ceux cultivés biologiquement ont un coût climatique inférieur de moitié à celui des produits conventionnels car elles ne dépendent pas d’engrais chimiques, mais tous les produits d’origine végétale ont des émissions bien plus faibles que les produits d’origine animale.
Les chercheurs ont déclaré que l’analyse montrait un besoin de mesures politiques urgentes, telles que des taxes sur la viande, pour garantir que les prix des denrées alimentaires reflètent leurs coûts réels. Ce serait plus juste, disent-ils, car les consommateurs qui suivent des régimes alimentaires néfastes pour le climat paieraient pour leur pollution, plutôt que de payer les coûts de l’augmentation des catastrophes naturelles et des conséquences du dérèglement climatique , comme c’est le cas aujourd’hui. Ils ont déclaré que les recettes ainsi obtenues devraient être utilisées pour soutenir les familles les plus pauvres à gérer les hausses de prix, ainsi que pour aider les agriculteurs à des pratiques plus respectueuses de l’environnement.
Les chercheurs ont calculé les augmentations du prix des divers produits alimentaires nécessaires pour couvrir les coûts climatiques. Ces augmentations entraîneraient une hausse d’environ 40 % des prix de la viande conventionnelle dans les magasins. L’augmentation du prix de la viande biologique serait d’environ 25 %, car elle est plus chère au départ. Le lait conventionnel augmenterait d’environ un tiers pour les acheteurs et le lait biologique d’un cinquième, mais le prix des aliments d’origine végétale ne changerait pratiquement pas.
Les recherches se basent sur la production alimentaire allemande, mais les scientifiques ont déclaré que les résultats seraient similaires dans tous les pays de l’UE. Bien que ne tenant compte que du bétail élevé en Allemagne, elle a pris en compte les émissions d’aliments importés, comme le soja.
« Nous nous attendions à ce que l’agriculture biologique obtienne de meilleurs résultats pour les produits d’origine animale mais, pour les émissions de gaz à effet de serre, cela ne fait finalement pas beaucoup de différence », a déclaré Maximilian Pieper, de l’université technique de Munich, qui a dirigé la recherche. « Mais pour certains autres aspects, l’agriculture biologique est certainement meilleure que l’agriculture conventionnelle ». L’utilisation excessive d’engrais chimiques et la mauvaise gestion du fumier entraînent une pollution de l’eau et de l’air, tandis que les pesticides peuvent nuire à la faune.
Amelie Michalke, de l’université de Greifswald et membre de l’équipe d’étude, a déclaré « Les prix mentent. Les coûts climatiques augmentent et nous les payons tous – ils ne sont pas répercutés de manière adéquate sur les produits les plus polluants ».
L’étude, publiée dans le journal Nature Communications a utilisé l’estimation du gouvernement allemand des coûts des dommages climatiques – 180 € par tonne de CO2 – qui est basée sur les travaux du GIEC. Elle a révélé que le prix à la production du bœuf devrait être plus de 6 €/kg plus élevé pour couvrir les coûts climatiques et environ 3 €/kg de plus pour le poulet.
« Les coûts des dommages causés au climat pour la viande sont particulièrement alarmants si on les compare aux autres catégories », a déclaré M. Pieper. « Les augmentations de prix nécessaires sont 10 fois plus élevées que pour les produits laitiers et 68 fois plus élevées que pour les produits à base de plantes ».
« Cette grande différence découle majoritairement du fait que lorsque vous avez un champ de végétaux et que vous les mangez directement, on peut alors dire que c’est la fin de la production des émissions », a-t-il déclaré. « Mais pour le bœuf, par exemple, il faut 42 kg d’aliments pour produire 1 kg de bœuf. Cette énorme inefficacité explique l’écart ».
Même la viande la moins polluante, le porc biologique, a un coût environnemental huit fois plus élevé que les produits d’origine végétale les plus polluantes, soit les oléagineux conventionnels. Contrairement aux autres viandes, la viande de porc biologique a des coûts climatiques plus faibles que la viande de porc conventionnelle parce que cette dernière est nourrie avec plus d’aliments importés que les autres animaux d’élevage, et est donc responsable de plus de déforestation.
« Cette analyse confirme les coûts élevés que les aliments d’origine animale ont pour la planète », a déclaré le Dr Marco Springmann, de l’université d’Oxford, au Royaume-Uni, qui ne fait pas partie de l’équipe de l’étude. « Les implications politiques sont claires : l’application d’un prix des émissions dans tous les secteurs de l’économie, y compris l’agriculture, constituerait une incitation cohérente et bien nécessaire à l’évolution vers des régimes alimentaires plus sains et plus durables qui doivent être principalement à base de plantes ».
En plus des dommages environnementaux, les niveaux élevés de consommation de viande dans les pays riches nuisent à la santé des gens. En 2018, des recherches menées par Springmann et ses collègues ont calculé qu’une taxe de 20 % sur la viande rouge serait nécessaire pour couvrir les coûts de santé associés, et une taxe de 110 % sur les produits transformés tels que le bacon, qui sont encore plus nocifs.
*Fin de la traduction*
Vous l’aurez compris, cette étude démontre clairement que l’impact environnemental des végétaux – même les plus polluants – reste bien plus faible que le meilleur des produits d’origine animale.
Ainsi, les arguments visant à donner une image favorable à la viande biologique et locale doivent être rejeté au sens de cette étude.
Certes, ce genre de production est bien plus acceptable que les fermes usines et l’élevage intensif, toutefois il n’est pas forcément moins problématique sur le long terme quant à son impact environnemental et, il ne change bien entendu rien à la finalité des animaux élevés, soit leur mise à mort alors qu’ils n’en sont même pas au 1/4 de leur durée de vie usuelle…
Jocelyne Porcher et tous ses comparses arguant que « l’élevage paysan » est la clé sont à nouveau mis à mal : une alimentation végétale, au maximum locale et biologique sera toujours meilleure d’un point de vue environnemental et éthique – de même que réalisable à grande échelle – qu’une alimentation carnée, toute autant biologique et locale qu’elle puisse être.
De quoi réfléchir pour une mise en pratique en cette année 2021 qui ouvrira son premier chapitre avec une pandémie mondiale présente depuis près d’une année et dont la propagation est facilitée par les élevages industriels…
Un changement de paradigme est nécessaire.
Cloé Dutoit