L’adaptation de la loi sur le CO2

Leïla Weber décrypte pour nous les prochaines votations du 13 juin

Comme de nombreux autres pays, la Suisse s’est engagée à réduire significativement ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 afin de participer activement à la lutte contre le réchauffement climatique, dont elle n’échappe pas aux conséquences. Pour ce faire, elle a donc décidé de modifier la loi déjà existante sur le CO2, ce qui a suscité une vive réaction de la part de certains milieux, qui ont ainsi constitués des comités référendaires pour dénoncer cette révision de loi qu’ils estiment injuste et jugent inefficace.

Aux grands maux, les grands remèdes

Signataire de l’Accord de Paris sur le climat institué lors de la COP21 de 2015, la Suisse s’est engagée aux côtés de 189 autres pays du monde à lutter activement et de manière universelle contre le réchauffement climatique. Si cet accord repose sur un engagement juridique de principe sans réelle valeur contraignante, la Confédération, consciente de l’urgence climatique, a pourtant saisi l’opportunité de renforcer sa politique en la matière. Car la Suisse n’est pas épargnée par les effets du réchauffement climatique : canicules, sécheresses, inondations et glissements de terrain sont autant de conséquences de ce changement rapide de température, et c’est sans compter la raréfaction de la neige et le recul des glaciers. Ces différents phénomènes impactent de nombreux secteurs tels que l’agriculture, l’aménagement du territoire et le tourisme.

En un siècle, les températures moyennes en Suisse se sont élevées de 2°C, ce qui implique selon le rapport du projet de loi que « Notre pays se réchauffe […] deux fois plus vite que la moyenne mondiale ». Le dioxyde de carbone (CO2) étant le gaz à effet de serre principal responsable du réchauffement climatique, c’est contre lui qu’entend lutter prioritairement le gouvernement suisse avec le durcissement récent de sa politique climatique ; ainsi, le projet de révision de la loi sur le CO2 prévoit des mesures pour en limiter les émissions, mais également pour investir dans les nouvelles technologies et dans les énergies durables.

Concrètement :

La révision de la loi sur le CO2 mise sur un maintien des mesures qui existaient déjà au préalable, complétées d’incitations financières afin de continuer à encourager les comportements « respectueux du climat ». Les utilisateurs d’énergies fossiles sont toujours principalement visés par ces taxes et ce sont aujourd’hui les billets d’avion qui se verront nouvellement imposés si le projet de révision de loi est adopté.

Ainsi, les personnes voyageant plusieurs fois dans l’année se verront taxées à l’achat de leurs billets d’avion alors que celles limitant leurs déplacements à un vol se verront restituer une partie de cette taxe.

La taxe sur le CO2, déjà en vigueur depuis 2008, continuera, elle, à être appliquée : de la même manière que pour les billets d’avion, les ménages ou entreprises utilisant des systèmes de chauffage au mazout ou au gaz continueront à être taxés, au contraire des personnes privilégiant des énergies plus respectueuses de l’environnement. À noter que cette taxe pourrait être augmentée davantage si la réduction des émissions de CO2 ne s’avère pas suffisante. En outre, la taxe sur l’essence et le diesel pourrait elle aussi être augmentée d’encore 7 centimes/litre au maximum, selon les besoins des importateurs qui devront eux aussi investir dans la protection du climat.

Grâce à l’application du principe du pollueur-payeur, le gouvernement entend donc récompenser les bons comportements et encourager les marges de progression là où elles existent. Ainsi, la majeure partie des revenus générés par ces différentes taxes devront obligatoirement être réinvestis dans l’environnement, comme l’explique le projet de loi : « Un tiers de la taxe sur le CO2 et la moitié au plus de la taxe sur les billets d’avion [seront] versés dans le Fonds pour le climat, afin de promouvoir les investissements respectueux du climat et de soutenir les entreprises novatrices. Le Parlement veut ainsi générer du travail en Suisse et créer des emplois porteurs d’avenir dans notre pays ».

Quant au solde de ces taxes d’incitation, il sera redistribué à la population et à l’économie toujours selon le même principe.

Les opposants demandent un référendum

Selon les comités référendaires, cette révision de la loi sur le CO2 est problématique à différents égards. Tout d’abord, ils estiment que la répercussion de ces nouvelles taxes sur la population et les entreprises suisses sera trop lourde en termes financiers, car elles vont coûter cher. Ils trouvent par ailleurs ces nouvelles mesures injustes et antisociales car elles touchent selon eux toujours les mêmes catégories, dont notamment les personnes/ménages à bas et moyens revenus. Enfin, ils jugent que cette loi révisée sera inefficace, considérant qu’il ne sert à rien que la Suisse, responsable de seulement 0.1% des émissions de gaz à effet de serre mondiales, prenne de telles mesures alors que certains pays bien plus concernés par ce problème ne daignent pas prendre leur responsabilité.

Il est intéressant de constater que les référendaires proviennent de bords totalement opposés, avec des arguments bien différents. Pour les uns (SolidaritéS/POP/certaines sections de la Grève du Climat), cette loi est antisociale et ne va pas assez loin pour contrer l’urgence climatique et écologique, pour les autres (UDC), elle est effectivement antisociale, mais également extrême.

La Suisse a néanmoins pris des engagements et s’est fixée des objectifs qu’elle entend bien tenir. Le pays souffre des effets du réchauffement climatique aussi bien qu’il participe aux émissions de gaz à effet de serre et, à ce titre, il doit faire sa part. D’ailleurs, comme mentionné au préalable, la Suisse se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne mondiale – il est donc urgent de réagir avec des mesures appropriées. Or, comme l’indique le Parlement dans son rapport, « Si la loi sur le CO2 révisée est rejetée, la Suisse ne pourra pas réduire efficacement ses émissions de gaz à effet de serre. Elle ne parviendra pas à atteindre son objectif climatique car la loi actuelle n’y suffit pas ».

 

Leïla Weber

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