L’OLÉODUC DE LA DISCORDE

Leçon de rattrapage sur l'affaire des pipelines américains

En janvier dernier, Donald Trump (encore lui) choquait (à nouveau) l’opinion publique en signant deux décrets concernant des oléoducs dont les projets de construction avaient été interrompus en 2015 par le gouvernement de Barack Obama, pour des raisons de sécurité énergétique. Le président des États-Unis souhaite relancer l’installation de ces deux pipelines, à des fins économiques ; un inquiétant retour en arrière quant à la politique environnementale mise en place par son prédécesseur.

Photo: Sara Lafleur-Vetter

1900 km de tuyaux et de pétrole

Un pipeline est une canalisation permettant d’acheminer une matière première comme le pétrole, le gaz ou l’eau, d’un point A à un point B. L’oléoduc, lui, est spécifique au transport du pétrole et revêt une importance toute particulière dans les questions géopolitiques actuelles pour deux raisons : l’épuisement des ressources de pétrole et la protection de l’environnement.

En effet, les excès liés à la surindustrialisation qui sévit depuis le début du 20e siècle épuisent les ressources de pétrole, faisant de cette matière première une denrée de plus en plus rare et chère. Son extraction est donc une source de conflit, notamment entre le Moyen-Orient, où la production est très concentrée, et les pays consommateurs, souvent de grandes puissances.

Par ailleurs, un oléoduc a des effets potentiels dangereux pour l’environnement et pour le réchauffement climatique. Les fuites de pétrole ont des conséquences écologiques néfastes, polluant le sol et contaminant l’eau. En avril 2010, l’explosion de la plate-forme pétrolière Deepwater Horizon, appartenant à la compagnie BP, provoque une gigantesque marée noire, répandant dans l’océan 780 millions de litres de pétrole. Barack Obama, alors président des États-Unis, durcit les règles en vigueur en matière de forage en mer, interrompant plusieurs chantiers en cours. C’est également pour des raisons de protection de l’environnement qu’il a souhaité, en novembre 2015, interrompre les travaux de construction de l’oléoduc, considérant que cette décision n’aurait pas d’impact significatif sur l’économie du pays.

Photo: Sara Lafleur-Vetter

Deux poids, deux mesures

Fier de la « position de leader » de son pays dans la lutte contre le réchauffement climatique, Obama entend mener une politique environnementale en accord avec les préoccupations actuelles, à plus forte raison en regard de l’inquiétant résultat des États-Unis au classement des émissions de gaz à effet de serre : ces derniers sont à eux-seuls responsables de plus de 17% de ces émissions, alors que la Suisse, en comparaison, en émet 0,14%.

Malheureusement, son successeur ne partage pas ses inquiétudes quant à la protection de l’environnement. Plus connu pour ses positions climatosceptiques, Donald Trump a vite balayé les considérations sur l’impact environnemental que peut avoir un oléoduc, plus préoccupé par la perte économique que représenterait l’abandon d’un tel chantier. C’est ainsi qu’en signant deux décrets, il relance les travaux de construction de l’oléoduc, un projet de pipeline de 1900 km relayant l’ouest du Canada au centre des États-Unis, mais également le Dakota Access Pipeline, un oléoduc traversant les États-Unis sur 1825 km.

Cette décision, fortement controversée, a fait l’objet de bon nombre de réaction chez les opposants au projet. Greenpeace a déclaré que s’il avait été possible de stopper le chantier une première fois, cela le serait une deuxième, alors que la Tribu sioux a promis une action en justice afin d’empêcher le passage de l’oléoduc sur des sites sacrés.

Leïla Weber

‘We’re not going home’: inside the North Dakota oil pipeline protest

Quelques images d’un rassemblement des « standing Rock Sioux » contre la traversée des terres sacrées par l’oléoduc. Réalisé par Sara Lafleur-Vetter pour The Guardian il y a à peine moins d’une année.