La production d’avocats assèche le Chili pour nos brunchs du dimanche..
Un nouvel article du Jeune engagé!
Photo © Greenpeace Chili
Depuis quelques années, l’avocat est devenu l’incontournable des brunchs, des toasts et autres petits apéros festifs. Détourné sous toutes ses formes, ce fruit, originaire du Mexique, est devenu très à la mode chez les occidentaux. Si cette surconsommation soudaine provoque déjà des pénuries d’eau au Mexique ou encore sur l’Ouest des Etats-Unis, le cas du Chili est particulièrement alarmant. (voir le reportage d’Envoyé Spécial « Les avocats du diable »)
Depuis plus de 15 ans, la production d’avocat n’a cessé de croitre dans le pays, pour exporter la variété d’avocat la plus demandée en Europe. Au fur et à mesure que les avocatiers se sont installés, les rivières ont disparu. Et pour cause, la production d’un kilo d’avocat nécessite 2000 litres d’eau soit 100 000 litres d’eau par jour pour un hectare de cet « or vert ». Dans la région de Pétorca, les plantations ont recouvert les vallées, bien que l’eau ne soit pas une ressource prospère. Au contraire, depuis une dizaine d’année, cette région chilienne enchaine les périodes de sécheresse. La consommation d’eau des avocatiers vient porter le coup fatal, empêchant l’accès à l’eau à près de 350 000 personnes. Comment est-ce possible que l’agriculture passe avant les habitants?
La réponse est simple. Au Chili, l’eau est reconnue comme un bien privé, et donc répond aux courbes de l’offre et la demande dans un marché économique. Les multinationales détiennent les principales sources d’eau potable et la revendent à des prix inaccessibles pour les habitants les plus précaires. Un vrai business s’est créé autour du marché de l’eau chilienne, et des entreprises comme SUEZ en profitent grandement. Dans les zones rurales comme la région de Petorca, les puits et forages communaux ont été asséchés par l’industrie agroalimentaire. Au final, il ne reste plus une goutte d’eau pour les habitants en période de sécheresse. L’État finance un système de camions-citernes, qu’il achète aux multinationales à prix fort, pour permettre le strict nécessaire.
Dans cette région, chaque habitant doit vivre avec 50 litres d’eau par jour (les meilleurs jours) ce qui représente 1/3 de notre consommation. Les habitants doivent trouver des systèmes pour récupérer l’eau pour ne pas en gaspiller, jusqu’à ne plus pouvoir utiliser les toilettes. En cette période de pandémie mondiale, le manque d’accès à l’eau est un barrière considérable contre les mesures d’hygiène, fragilisant ces populations face au virus.
Face à ce désastre social et écologique, les chiliens et les chiliennes se sont mobilisés pour faire changer les choses. En 2019, des centaines de milliers de personnes sont descendus dans la rue pour dénoncer les inégalités grandissantes dans le pays, et pour exiger la démission du président Pinera. Le combat de l’eau est un exemple concret de la politique du gouvernement chilien, où le tout économique a gagné sur le social. Les gens meurent de soif pour permettre aux multinationales d’engranger plus de profits.
Manifestations, blocages de routes et sensibilisation à l’international, différentes ONG environnementales continuent le combat pour dénoncer la descente aux enfers de plusieurs régions chiliennes. Cette année, un processus constitutionnel aura lieu dans le pays et les militants espèrent pouvoir défendre l’accès à l’eau et à la terre comme un droit fondamental.
De notre coté, pour soutenir le peuple chilien, nous pouvons également prendre conscience de l’impact de nos achats. Priver d’eau des centaines de milliers de personnes pour mettre de l’avocat sur un toast, cela en vaut-il vraiment la peine?
L’eau est une droit fondamental, un droit humain. Ne l’oublions pas.
« Le Jeune Engagé » Johan Reboul
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sources :
Alter Agua : Chili, les avocats symbole du pillage de l’eau
AFP : une fièvre de l’avocat très gourmand en eau
ARTE : se protéger du virus sans eau courante
Merci à Mathilde Jimenez pour ses recherches sur l’enjeu de l’avocat au Chili.